«L’homophobie n’est pas suffisamment marquée aux Creusets pour qu’on traite de ce sujet. » Voici qui confirme, si besoin était, de l’esprit traditionnaliste qui habite Benjamin Roduit, recteur du Lycée Collège des Creusets (LCC).
En interdisant la tenue d’un atelier de discussion sur le sexisme et l’homophobie, ce dernier vient une fois encore de témoigner de son esprit dénué de toute ouverture. Il faut dire que ce « bon » catholique n’en est pas à son coup d’essai.
Rappelons-nous de l’excellent article de Julien Repond « Religion à l’école : où se situe la ligne rouge ? » dans le Courrier en octobre 2014 dénonçant l’esprit particulier régnant dans l’établissement sédunois.
« Le contenu de certains cours et manifestation interpelle, ainsi que le manque d’objectivité qui y serait pratiqué. Prosélytisme, conférenciers controversés, positions homophobes, opposition aux moyens modernes de contraception… »
Pour étayer ses dires, le journaliste avait rencontré force étudiants et professeurs n’osant pas, sous peur de sanctions, s’exprimer à visage découvert.
Près de deux ans après, le climat est le même avec une nuance de taille : l’appui inconditionnel du chef du Département Oskar Freysinger. Alors qu’à l’époque ce dernier s’était montré relativement modéré dans ses réponses à Julien Repond, le voici aujourd’hui qui s’impose par un discours sans appel.
Discours diffusé sur les ondes de la RTS après l’annulation de l’atelier aux Creusets, qui témoigne de l’orientation UDC donnée à l’école valaisanne actuellement par le chantre de la pensée unique.
« C’est une tempête dans un verre d’eau ! Un mensonge inventé par une personne qui a essayé de tricher sur l’étiquette et de s’insérer dans les cours à travers un soi-disant projet pilote. Quand on s’est aperçu de cela, elle a été frustrée parce que l’on a dit stop, ça n’est pas ce qui avait été décidé…Les psychologues ont besoin de malades pour pouvoir exister…plus ils créent de problèmes, plus ils auront de travail. »
Les psychologues apprécieront et les homosexuels aussi, taxés de malades !
En prime, le chef du DFS s’en prenait à « la personne » de Johanne Guex, coordinatrice de la Promotion santé Valais (Antenne sida du Valais Romand) et responsable de cet atelier.
« Cette Madame Guex alerte tous les médias, crée une polémique qui n’en est pas et n’a même pas le courage de m’affronter s’exclamait avec emphase Oskar Freysinger. Je trouve ça lâche. Vous devez aller chercher quelqu’un à Genève pour oser discuter de la situation. »
Une réaction qui n’avait pas lieu d’être puisque l’interlocutrice choisie et invitée par la RTS n’était autre que la valaisanne Caroline Dayer, enseignante et chercheuse à la Faculté de psychologie et des sciences de l’éducation de l’Université de Genève, auteure de nombreux ouvrages sur le sujet des discriminations, et tout spécialement sur l’homophobie.
Loin d’entrer dans la pantalonnade initiée par le chef du DFS, cette éminente spécialiste a souligné le besoin réel et l’envie des élèves de parler de ces questions. Précisons que 40 jeunes s’étaient inscrits à l’atelier sur le sexisme et l’homophobie.
Dans la foulée, Caroline Dayer rappelait que le « contexte scolaire a le devoir de garantir des conditions d’apprentissage sécurisantes. On voit que la non prise en charge des questions d’homophobie est grave. Le taux de suicide des personnes homosexuelles est de 2 à 5 fois plus élevé. Et que la majorité se passe avant vingt ans. La décision d’annuler cet atelier est une décision homophobe institutionnelle.»
Loin de baisser les bras face à Oskar Freysinger, la doctorante confirmait le rôle important de la politique éducative et de santé publique dans les établissements scolaires, tous concernés par l’homophobie.
« Je constate, ponctuait la spécialiste, le retard du Valais sur ces questions et le non respect de non discrimination. »
Une opinion partagée par le syndicat SUD- Etudiant.e.s et Précaires et les milieux associatifs LGBT, tant aux niveaux cantonaux que nationaux, qui réagissent fortement.
Personnellement, si l’on excepte les outrages coutumiers du conseiller d’Etat, je vois un avantage dans cet évènement. De plus en plus, Oskar Freysinger dévoile les contours de sa personnalité empreinte de toute puissance. Un vrai despote (sans jeu de mots) autocrate prêt à imposer ses vues conservatrices à n’importe quel prix. Quant au recteur Roduit, il parvient à faire reculer un établissement qui avec son prédécesseur Jean-Jacques Schalbetter avait donné le ton d’une réelle ouverture.
Le Valais ne mérite-t-il pas mieux ?
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